Serre, carreaux et brouette
Des carreaux tirés au cordeau débarrassé de toutes adventices téméraires à la jungle joyeuse, pleine de courbes et de locataires parfois envahissants, la main du jardinier laisse une empreinte remarquée et remarquable.
Les jours s’étalent, le soleil s’affermit, la terre respire et les doigts grenouillent déjà d’impatience ! Et pourtant, la patience doit être un maître de l’art de jardiner, en la douce compagnie de l’humilité, de l’espoir, de la curiosité, de la méditation…
Palper, humer la terre, y planter un doigt curieux et sensible, la remercier, la gratter sans trop la bousculer, s’acharner sur des racines étouffantes, perforantes et terriblement performantes, l’aventure annuelle se prépare !
Youpla boum, y’a plus qu’à….
Le jardin est un reflet du jardinier
Le premier jet est toujours assez bien organisé en association de cultures, à chaque variété son pré carré en compagnie de ses copains, puis, au fil des récoltes, toute la belle organisation s’envole sous l’averse et chaque vide appelle un plein, 10 salades ici, 3 choux par là-bas, quelques graines pour faire des plantons au milieu des poireaux. Et à l’automne, bien malin est celui qui se souvient de quoi, où, quand et comment ! C’est un merveilleux mélange de légumes qui, petit à petit, prend le chemin de la resserre.
Les différentes cultures sont bien sûr influencées par les goûts et envies des destinataires, mais découvrir des nouveautés, diversifier les variétés, oser les essais, c’est comme le sel dans la soupe, indispensable mais demande à être dosé.
S’adapter au terrain
Le terrain, un peu champ caillouteux au départ, a été bien amélioré avec du compost et du fumier de la ferme. Cailloux, chiendent, rumex sont encore de la fête, mais un peu plus discrets.
Depuis plusieurs années, le gazon est séché soigneusement pour éviter qu’il ne pourrisse avant de l’utiliser en couverture, et quasiment aucun déchet ne quitte le jardin, tout est laissé sur les sentiers et entre les lignes afin que la terre ne soit pas nue. Ce mulch a permis de diminuer de façon significative les arrosages et les sarclages. Les limaces apprécient joyeusement cette situation confortable… et la chasse nocturne est une occupation très fructueuse… avec l’aide bienvenue de quelques hérissons !
Comme la ferme est alimentée uniquement avec de l’eau de pluie, la sécheresse oblige à des choix drastiques, et surtout, interdit l’arrosage automatique. La promenade du jet d’eau sur les lignes permet de rêver, de papoter…
Les maladies, surtout le mildiou ou les faiblesses, sont traitées avec du purin d’ortie, du petit lait, des oligos-éléments et du bicarbonate de soude en aspersion foliaire.
Choupisson ou Hérissoneau de quelques heures, né dans la paille des chevaux
Fouillis de l’été
La variété des cultures
Pouvoir disposer de toutes les sortes de légumes tout au long de la saison, et si possible sans interruption, est un joli défi !
Presque tous les plantons sont produits ici pour une trentaine de variétés différentes. Cet automne, il y avait, entre autres, 8 sortes de salades à choix et 3 variétés de haricots. Les rotations sont donc presque impossibles à respecter car plusieurs cultures se suivent sur le même carreau tout au long de l’année. Et suivre strictement le calendrier lunaire m’est une contrainte bien difficile, la météo, le temps disponible et surtout l’envie et l’inspiration me guident bien plus agréablement !
Une serre est venue ouvrir des champs d’exploration multiples : de la salade en plein hiver à 800 m d’altitude, des tomates, des aubergines, ainsi que les semis de plantons de toutes sortes dès le mois de février !!!
Trouver les bons rythmes, apprendre à gérer de nouvelles conditions, de quoi s’amuser, en apprenant… parfois aux dépens des essais.
Jardinage, leçon d’humilité et d’espoir…
Humilité devant mon impuissance à sauver les tomates atteintes de mildiou, devant 3 superbes plantes de courgettes dont les racines ont été coupées par les mulots, devant les haricots rames atteints d’une maladie inconnue…
Espoir magnifique quand, après l’averse, tout revit, s’ébroue et pointe vers le ciel, quand les carottes semées bien trop tard (début août) donnent jusqu’au froid des succulentes minis carottes d’apéritif, espoir surtout, quand après le terrible orage de grêle qui a laissé toutes les cultures à l’état de gazon haché, je découvre, après quelques jours, du cœur des plantes, une minuscule feuille qui capte délicieusement le soleil et la vie qui revient !
La terre est merveilleuse et généreuse et, si on la respecte, jamais elle ne trahit !
Décembre 2019 – Fanchette
La joie de la récolte